À l'ombre des jeunes filles en fruit

Quel charme trouble dégagent ces demoiselles parvenues à maturité et dont les comportements appellent encore des mesures que l'on croirait être le fait de la prime jeunesse ! Un éducateur expert saura conjuguer tendresse et rigueur à leur bénéfice et voilà ce qui fait l'objet de notre réflexion.

2/18/2006

Folle de son cul !

Elle l'est, n'en doutez point. Mais voilà le secret le mieux gardé qui soit. Jamais elle ne laisserait soupçonner l'extrême intensité de cette inclinaison, ni les déchaînements qu'elle lui inspire depuis la toute première enfance. Et sous le masque d'une parfaite assiduité scolaire et professionnelle, d'une culture générale tout à fait conséquente pour une jeune femme abordant l'âge adulte, d'un civisme de bon aloi... crament, bouillonnent, fusent des impulsions plus nues, plus crues, plus ardentes et plus sauvages que ne sauraient imaginer ses bien aimés parents. Et ces folies ne se présentent en société derrière le paravent des convenances que pour mieux laisser éclater leur explosive insurrection dans le secret de son intimité.

Comment expliquer ce mystère inattendu ? Avec le jour, son père, sa mère lui ont-ils légué les dérives qui les habitaient eux-mêmes ? Ou, au-delà de sa plus récente naissance, les a-t-elle héritées d'une existence antérieure et de dérèglements oubliés, tandis qu'elle poursuit sous un autre visage une vie nouvelle dont le cours est secrètement infléchi et le quotidien se trouve aujourd'hui hanté par l'ectoplasme d'écarts commis dans un autre temps, un autre lieu, un autre corps et qui l'envoûtent, la tiennent fermement dans la poigne de fer de leurs conséquences, encerclent sa taille, saisissent sa nuque, l'entraînent lorsque tombe le soir dans une galopade trébuchante et haletante sur les chemins de déchaînements inédits, éclairés d'un rayon de lune oblique et glauque, dont la perspective fuyante et les aguicheries l'émerveillent, et dont la soif inassouvissable lui fait craindre les émois de sa propre chair.

Pourquoi naître, si c'est pour naître à cela ? Pourquoi vivre si c'est pour porter toute nue, comme une putain exposée sur le gibet de la passion, l'invisible joug d'un pareil esclavage ? Mais comment ne pas fléchir humblement et déclarer forfait face à l'injonction d'un destin irrésistible et qui saisit son intimité avec l'impérieuse rudesse d'un geôlier, d'un bourreau du coeur et du cul ? Comment ne pas recevoir à genoux et à pleine bouche la grâce noire de ce pain de la pauvresse que la vie lui enfourne au poing et à pleine gorge, au son des paroles de l'Institution, affreusement inversées comme une formule cabalistique : « Ceci est votre corps... livré ! » Quelles macérations, quelle discipline, quelle pénitence éteindrait la fougue rageuse qui fond sur elle dans la solitude de ses rêves pourtant amoureux, mais avivés par une sensualité si désespérément déchaînée qu'ils adoptent la forme d'un fascinant et impérieux dérèglement ? Quelle méthode, quelle conviction, quelle révélation la libérerait de cet exil d'elle-même au fil duquel ses pas s'égarent in partibus infidélium et là où la carte du tendre indique hic sunt leones. Car ils rugissent, ces fauves de l'esprit, à la recherche de son âme et ne rêvent que de saisir entre leurs crocs ce morceau de roi. Comme si elle était mise en pièces à titre d'attraction des jeux du cirque, ce qui pose la question de savoir quel Empereur a conçu ces redoutables réjouissances, quel tyran du haut de sa loge assiste, souriant, au spectacle de son équarrissement ?

Ses orifices innervés, leurs spasmes saccadés comme les lèvres d'un nourrisson qui tète, premier de tous les appétits, leur arôme intime, leurs liqueurs même la fascinent tant et si bien qu'elle les manualise et les titille, les distend et les fait rouler entre la pulpe de ses doigts odorants et poisseux, les tord, en griffe le pourtour, les explore de l'index, puis ajoute le majeur, met à l'index l'anus mirabilis, l'anus horribilis qui n'en peut plus d'être relégué aux oubliettes de l'indignité, tandis qu'elle investit et butine à l'aide de tous ses autres agiles congénères la fleur profane qui orne sa vallée des parfums, dont l'épanouissement appelle des soins particuliers et qui réclame gaillardement son dû. Parfois, elle en caresse d'abord avec une délicatesse exploratoire le pourtour, en délove et déploie les pétales, la corolle, pour mieux éveiller son appétit. Elle préfère, dans ce cas, faire naître, moderato, cultiver et solliciter lentement par ces mignardises la fascination qui bientôt s'emparera d'elle pour l'emporter au pays des cauchemars.

Et alors, monte en cette fille qui doit se perdre pour se retrouver la puissante voix d'une gouvernante allemande, ou d'une directrice à la large carrure, aux seins hénaurmes sous l'uniforme, aux mains larges comme des rames aux hanches trapues comme ces chênes que l'on n'abattra pas. Ou encore elle s'imagine placée sous la férule d'une maîtresse de discipline britannique qui fait régner sa poigne de fer sur un établissement de redressement dont la rigueur toute nordique mâte les tempéraments les plus dissipés, étrangle les insolences avant même qu'elles n'osent s'exprimer. Comme si ses ruades de pouliche indomptée, ses déhanchements de fille publique en mal de mâle appelaient un dressage conçu par une redoutable nanny rompue à l'exercice, une incarcération particulièrement restrictive, une mise en pension conçue pour sonder ces reins, ce coeur, cette croupe en cavale, lui faire avouer dans le détail toutes ses soifs goulues. Comme si ses incartades constituaient un appel au secours désespéré réclamant que d'autorité une main souveraine et un bras puissant viennent la saisir par les cheveux pour l'extirper de ses turpitudes et l'astreindre à plus de modération.

Mais les restrictions qu'elle évoque ne font qu'aviver, par l'affolement qu'elles lui procurent et qui l'éperonne encore plus amoureusement, le dérèglement de son imaginaire. Car c'est tout le long du corridor menant au sombre bureau où siège une mystérieuse et redoutable instance auréolée de crainte et de délicieuse frayeur qu'elle se voit maintenant trottiner comme une écolière irrésistiblement menée à sa correction du samedi soir sur le coup de minuit, flambant nue. Les entraves qui raccourcissent son pas et la font trébucher, le poing logé au creux de son dos et qui enferre ses poignets croisés pour mieux lui imposer une galopade éperdue en la projetant en avant, les mains musclées qui la soutiennent et la surélèvent à demi en la portant sous les aisselles, le martinet qui pour mieux la faire avancer au petit trot fustige en cadence ses miches qui se dodelinent et frémissent tandis que ses hanches chassent de droite et de gauche en alternance à chaque enjambée, le ballet de ses cuisses qui se croisent à chaque pas alors que ses escarpins patinent sur le parquet ciré car ils survolent le sol plus qu'ils ne s'y posent, toute cette équipée éperdue, bien qu'imaginaire, ne fait qu'aviver encore ses appétits.

O Kuan Yin, salvatrice compatissante, bodhisattva, mère de la miséricorde, peux-tu illuminer jusqu'au plus creux, au plus sombre, les gouffres qu'entrouvre sous ses pas le vertige des sens ? Ou abandonnes-tu au sort qui les engloutit des âmes nées pour expier les fautes qu'elles ne commettent que sous contrainte et emportées par l'ouragan d'une irrésistible folie ? O miséricorde universelle, ta mansuétude s'étend-elle à tout ce qui vit ou ne délaisse-t-elle pas sélectivement, inexplicablement, impitoyablement ces enfants de l'ombre qui la portent en eux comme un destin, un pan de nuit sans luminaires dans laquelle ils èrrent à tâtons, au fil de leurs égarements ?

Et si elle faisait taire les hurlements goguenards qui lui dictent son inconduite... en mettant son esprit à blanc ? En opérant un fondu au noir ? Silence. Rythmé par la pulsation première du battement de son coeur et par le rythme élémentaire, originel de sa respiration. Chuchotements de l'Être. Pas une pensée. Pas l'ombre d'une image. Que lui resterait-il ? Au coeur de son coeur, un océan infini, une mer étale parcourue de coulées d'aube. Si elle pouvait cesser d'agiter d'un doigt nerveux le ruisseau de sa conscience tenaillée, brouillée, perturbée, pour que l'eau apaisée présente à la lune sa face enfin étale et lui renvoie l'image sans distorsion de son disque argenté ? Tout en plongeant ses racines dans la vase de l'étang où la vie l'a sans doute plantée, si elle parvenait à amorcer la mystérieuse alchimie qui y trouvera ses sucs nutritifs en la transmuant en sève, à dresser sa tige au-dessus de la surface lustrée et foisonnante de vie de ce lagon pour déployer ses pétales sous la lumineuse caresse d'un après-midi d'été ? Ne trouverait-elle pas, alors, la paix ?








1 Comments:

Blogger sarahh said...

Bien le bonjour André!

bises

5:55 a.m.  

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