Très chair... Je suis là, tout près de toi, juste derrière la porte de ta chambre. Elle baigne dans un rayon de lune inquisitif filtré par le balancement aérien des rideaux … et sur fond de silence, tu entends, à peine perceptible, le chuchotement de ma voix. L'accompagne en duo le chuintement de ton corps nu roulant et se débattant sous la légère et enveloppante caresse des draps qui l’emmaillotent comme un coc
on recueille une chrysalide. Dépossédé, privé, assoiffé des faveurs qui sont l’éloquent témoignage de l’attachement… ses mille impulsions te tenaillent et t’aiguillonnent avec une amoureuse évidence… puisque cette nuit, sur mon ordre, tu dors nue pour mieux éveiller ton cœur, aviver ta soif, aiguillonner ta faim… puisque tu t’es bandé les yeux d’un foulard de soie noire... puisque tu as en
roulé complaisamment autour de tes poignets qui s’entrecroisent au dessus de ta tête couronnée d’or le large ceinturon de cuir à boucle cuivrée qui semble l
es lier avec une rigueur toute carcérale, te faisant prisonnière.
Savoure la montante marée d’ivresse qui lentement t’engloutit, le vertige entêtant qui te fait perdre pied et d’une chiquenaude t’invite à basculer dans l’aba
ndon… délove, laisse se dénouer la lanière de cuir en m’imaginant qui te libère…délie tes poignets souples … oui… ramène les avant-bras le long de ton torse en deux arcs de cercle, comme une enfant dessine un ange dans la neige poudreuse, comme une alouette donne un coup d’aile afin de prendre plus d’altitude. Croise tes mains adroites sur le doux bombé de ton ventre et laisse tes doigts rêveurs courir jusqu’au bosquet, jusqu’au jardin clos de ton sexe où roucoule ta fontaine, jusqu’au cœur de ton coeur où fleurit la splendeur tropicale qui rend lentement et goutte à goutte son suc à la pensée de leur contact. Manipule la délicatement avec la précaution d'une bouquetière, comble de pinçons appliqués du bout des ongles ses lobes si tendres, parcourus de friselis et lustrés de liqueur… ouvre tes cuisses
ronde
s, blanches, fuselées comme si Rodin en avait ciselé la longue courbe dans un marbre précieux... tandis que tu entends mon pas de loup qui s’approche de ta couche… tandis que tu imagines mes mains les empaumant de part et d’autre du sillo
n marquant leur point de convergence duveteux pour les ouvrir plus largement encore, comme les pages d'un livre sacré dont je veux percer le mystère… tandis que la caresse de mon souffle parcourt ton intimité l’espace d’un insoutenable instant… avant que mes lèvres ne s’ouvrent toutes grandes comme la gueule avide, béante d’un poisson phosphorescent issu des profondeurs glauques de ton âme et que ma bouche goulue ne cueille, ne happe et n’aspire tout entier le
délice proposé à sa généreuse gourmandise… avant que ma langue en explore le puits rosé et en goûte le parfum d’océan remontant comme un saumon à la source première de l’Être. Si tes mains osent m’interdire ton alcôve en un ultime accès de désobéissance entêtée… je sa
isirai tes poignets et de ma voix d’acier que tu connais aussi, qui fait tressaillir ton âme, mon petit je te menacerai du fouet pour cette rébellion.
Vaincue, comblée enfin, tu lâches prise, tu te livres toute… tu t’abandonnes comme une trapéziste se lance, s’envole, exécute en un éclair son triple salto puis déploie tout son êt
re et tend les bras à l’aveugle, certaine que son partenaire, son complice, son amant, son frère, son père, son homme la saisira puissamment au vol, en cadence et en souplesse à l'instant glorieux où monte, crépite, déferle la vague des applaudissements… et tu gémis, tu couines, tu chantes, les râles jaillissent de ta gorge... ta croupe cavalière retrouvant sa spirituelle vivacité s’incurve, se dodeline, chasse de droite et de gauche et creuse le matelas, dansant le balladi des nuits endiablées !